Luxemburger Wort

Lever de voile sur les mystères de la harpe

Dans la série «Rising Star» à la Philharmonie: portrait-découverte de la harpiste Anaïs Gaudemard

·      Luxemburger Wort

·      15 Feb 2019

Anaïs Gaudemard, entre naturel et vivacité. (PHOTO: A. SALGUEIRO)

La harpiste Anaïs Gaudemard – invitée du cycle «Rising Star» de la Philharmonie – a présenté un programme aussi surprenant que varié mercredi soir à la Philharmonie. Conquis dès les premières mesures par la vivacité et le naturel de son jeu, les auditeurs charmés se sont laissé entraîner de bon gré le long de ce séduisant voyage musical.

Elégante dans sa robe noire à traîne, la jeune musicienne a pris place derrière son magnifique instrument, une majestueuse harpe Style 23 Gold de la marque Lyon & Healy (Chicago) richement décorée. Autour d’elle, de minuscules projecteurs multicolores ont créé une ambiance légèrement tamisée, version moderne de l’éclairage aux chandelles.

Brillant point de départ de ce portrait-découverte, «Introduction & Variations sur des thèmes de Norma de Bellini», du harpiste britannique, Elias Parish Alvars. Composée en 1836, cette partition met magnifiquement en valeur les qualités de la harpe moderne. Utilisant au mieux l’incomparable palette de timbres et la résonance chaleureuse de son instrument, Anaïs Gaudemard a souligné avec souplesse le caractère expressif de la ligne mélodique, lui offrant pour écrin un accompagnement délicatement nuancé.

Une mélodie pure Une autre page originale pour harpe a suivi, avec «Impromptu», op. 86, de Gabriel Fauré – une pièce cristalline aux multiples. La harpiste s'est lancée tantôt dans des glissandi poétiques, tantôt dans des arpèges lumineux et contrastés, tout en maintenant la pureté et la continuité de la mélodie. De Claude Debussy, le célèbre «Clair de lune», tiré de la «Suite bergamasque» pour piano, a bénéficié d’une lecture fidèle, s’enrobant toutefois volontiers d’une aura mystérieuse et un éventail de sonorités irisées.

La jeune artiste a poursuivi avec la Sonate en la mineur, K 109, de Domenico Scarlatti, pour clavecin. Ici encore, la finesse des ornements, la souplesse expressive de la ligne mélodique et la clarté du discours ont convaincu.

Dernière pièce de la première partie, «Légende», une page périlleuse et hautement dramatique de la harpiste Henriette Renié, a fait penser à un véritable poème symphonique. Cette oeuvre fortement colorée a permis à Anaïs Gaudemard de déployer un jeu contrasté et virtuose

Après l’adorable et volubile «La Source» op. 23, d’Albert Zabel, encore un virtuose de la harpe, la soliste a présenté «Nighthawks», une création de Camille Pépin. Ayant proposé à la compositrice d’écrire une pièce pour harpe seule en se basant sur le thème des oiseaux, cette partition est inspirée d’un tableau d'Edward Hopper montrant quatre personnes, c’est-à-dire des «oiseaux de nuit» humains, dans un bar quelque part aux USA… La jeune harpiste n’a pas hésité à empoigner archet et pinces à linge pour se lancer dans une interprétation aisément accessible. Cette page a semblé quelque peu superficielle et dénuée de mystère par rapport au reste du programme.

Après «L’Alouette», de Michaïl Glinka, dans une transcription aussi brillante que légère de M. Balakirev, l’artiste a choisi de conclure par une imposante pièce de bravoure, une transcription d’un poème symphonique de Bedrich Smetana, «Ma Patrie: La Moldau». Anaïs Gaudemard s’est surpassée, parvenant à superposer maints éléments complémentaires sans jamais perdre le sens de la continuité ou s’essouffler.

Pour clore cette soirée riche en découvertes, la jeune harpiste a donné un charmant bis au caractère hispanique.

 

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